L’Histoire de l’art contemporain – Jean-Luc Chalumeau

Pour ma deuxième lecture, j’ai choisi un livre qui m’a donné du fil à retordre à résumer : L’histoire de l’art contemporain de Jean-Luc Chalumeau. J’avoue que j’ai un peu de retard (d’une semaine pour être exact), mais bon, comme on dit : « c’est en forgeant que l’on devient forgeron », ou en ce qui me concerne, « c’est en résumant que l’on devient résumeur” ? “Synthétiseur” ? Bref vous m’avez compris.

Le livre en question est découpé en 50 parties qui n’ont pas une suite directe, chacune ayant sa propre logique. Ça m’a posé quelques soucis, mais j’espère avoir réussi à transmettre l’essentiel de ce que l’auteur voulait exprimer.

Alors, installez-vous confortablement avec une tasse de thé ou un bon chocolat chaud et bonne lecture !

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Livre l'histoire de l'art contemporain par Jean-Luc Chalumeau
Sommaire

Qui est Jean-Luc Chalumeau

Jean-Luc Chalumeau est un historien de l’art et un critique d’art français né le 7 avril 1939. Entre 1981 et 1995 il est le directeur de la revue d’art contemporain Opus international. Il est également le fondateur et directeur de la revue VERSO. Jean-Luc Chalumeau est un critique d’art renommé dont son travail lui a valu plusieurs distinctions honorifiques comme l’ordre national de la Légion d’honneur. Il a enseigné à Sciences Po et à l’ENA en tant que maître de conférences. Il a aussi créé un enseignement consacré à la lecture de l’art à l’université Paris VIII. Actuellement, il est professeur d’histoire de l’art contemporain à l’ICART.

D’autres livres de l’auteur :

L’art contemporain, 2016

Comprendre l’art contemporain, 2010

La nouvelle figuration: une histoire, de 1953 à nos jours : figuration narrative, jeune peintre, figuration critique, 2003

La lecture de l’art, 1981

L’histoire de l’art contemporain en 50 questions

Le résumé de la 4ème de couverture

« Aujourd’hui, nous a enseigné George Dickie, n’importe quel artefact peut être qualifié d’œuvre d’art, pourvu que le “monde de l’art” en ait décidé ainsi.

L’une des ambitions de ce livre est de montrer par quels chemins, de Marcel Duchamp à l’art vidéo, en passant par Jasper Johns, Andy Warhol et les minimalismes, on a pu en arriver à un tel élargissement de la notion d’œuvre.

En retraçant cette évolution, c’est toute l’histoire de l’art moderne depuis 1912 qu’on écrira étant entendu que l’art dit “contemporain” ne peut en être séparé. »

Introduction

1) Qu’est-ce que l’art contemporain ?

Jean-Luc Chalumeau entame son ouvrage en présentant l’art contemporain, tout en soulignant la controverse qui l’entoure. Il existe un manque de consensus quant à sa définition et sa nature. Bien qu’il soit critiqué pour son caractère banal et sa prétendue impossibilité à être jugé sur le plan esthétique, il a parfois également été rejeté pour son lien étroit avec les régimes totalitaires.

En parallèle, d’autres penseurs et critiques tentent de définir l’art contemporain et mettent parfois en évidence une rupture temporelle dans l’histoire de l’art. Le but de ce livre est de démontrer comment l’art contemporain est arrivé à occuper une telle place et pourquoi il suscite autant de débats.

I. Celui par qui “l’art contemporain” est arrivé

2) Quelle est l’influence de Marcel Duchamp sur l’art du XXème siècle ?

La méthode de Marcel Duchamp est devenue la référence dans l’art contemporain, mais pour certains, elle est également la cause de la crise de l’art qui dure depuis plus de 50 ans maintenant.

Au départ, Duchamp explorait les possibilités de représenter le mouvement de manière singulière en s’impliquant dans des mouvements artistiques modernes tels que le fauvisme et le futurisme en tant qu’artiste.

Malgré sa reconnaissance en tant que peintre, il décide de tout abandonner et de se tourner vers les sciences exactes et la méditation, ce qui conduira rapidement à l’apparition de ses premiers ready-made.

3) Duchamp est-il l’auteur d’une mutation ou d’une révolution ?

Avec ses ready-made, Marcel Duchamp opère une véritable mutation dans le domaine de l’art. Il cesse de peindre pour ne créer que des objets et des machines énigmatiques, affirmant que l’art en général et la peinture rétinienne, en particulier, ne servent qu’à procurer du plaisir visuel.

La création de son œuvre La mariée mise à nu par ses célibataires, même entre 1915 et 1922 témoigne de sa volonté de se détacher de la peinture. Ce travail a permis l’intégration de matériaux et de médias qui n’étaient pas utilisés dans l’art moderne jusqu’alors, initiant ainsi l’utilisation d’objets dans les créations artistiques.

Il est important de souligner que Duchamp a apporté une conception de « l’art d’attitude », qui repose davantage sur « la prise de position intellectuelle de l’artiste »p.22 . Cette approche donnera naissance à des mouvements tels que le Cinétisme ou le Pop Art.

4) Que signifie pour Duchamp le passage à l’offensive ?

L’auteur nous invite à nous interroger sur la vision de Duchamp, pour qui l’avènement de l’industrialisation signifiait la fin des fonctions artisanales de l’art. Face au déclin de la peinture, une réponse a été le passage à la peinture abstraite, une renaissance de la peinture en tant qu’idée.

Duchamp passe alors à l’offensive en proposant Fontaine, un urinoir qu’il expose sous le nom de R. Mutt lors du salon des artistes indépendants de New York en 1917. Duchamp qui faisait partie du jury d’exposition changea de nom pour rester anonyme et ne pas influencer le public qui connaissait son travail de peintre. Cependant, Fontaine n’a pas été accepté et Duchamp la retira de l’exposition.

5) En quoi consiste finalement la démonstration essentielle de Duchamp ?

L’urinoir de Duchamp est une démonstration de la remise en question du statut social de l’œuvre d’art.

Lorsqu’il est exposé sous le nom de R. Mutt, un artiste inconnu, l’urinoir n’est pas considéré comme une œuvre d’art. Cependant, lorsque Marcel Duchamp assume l’œuvre sous son vrai nom, elle devient légitime.

Le critique Thierry De Duve affirma que “l’art n’est légitime que par comparaison et que la comparaison ne peut se faire que par ce qui est déjà légitime”p.24. Pour lui, Duchamp a rejeté la tradition de l’art en s’appuyant sur aucune comparaison possible avec son urinoir, car personne n’avait jamais exposé un objet commun, ce qui a discrédité la légitimité de son œuvre.

Enfin, l’auteur mentionne l’exposition d’ouverture du centre Pompidou en 1977, où les organisateurs ont choisi de faire une rétrospective sur Marcel Duchamp. Ce choix peut paraître paradoxal pour un musée d’art, si l’on suit le raisonnement de De Duve mais montre surtout que Duchamp est devenu une référence offrant de multiples possibilités artistiques.

II. Le triomphe de la peinture américaine

6) Dans quelle circonstance historique a émergé la place artistique de New York ?

Dans cette partie, Chalumeau explique comment certains milieux américains ont imposé l’idée d’une supériorité de l’art américain, considérant qu’il était indépendant du reste de l’histoire de l’art. Selon cette vision, les artistes américains se sont faits seuls, occultant ainsi toute la complexité du contexte politique et social dans lequel ils évoluaient.

L’essor de la peinture américaine a été en partie contribué par la Seconde Guerre mondiale qui a remanié la scène internationale de l’art, la France occupée n’étant plus la capitale de celui-ci. Cette émergence a engendré une pensée d’un art américain qui se veut séparé d’un héritage européen. Toutefois, l’auteur souligne que cette séparation est un faux problème car un artiste américain est forcément américain et que sa peinture est déterminée par ce fait. Ainsi, une peinture est inévitablement influencée par l’expérience du peintre, et penser qu’il existe un art purement américain ou européen est absurde pour l’auteur. Celui-ci précise que les problèmes essentiels de la peinture sont indépendants des pays.

Enfin, la partie se termine sur les prémices du jeune peintre américain Jackson Pollock, qui s’engage petit à petit dans ses dripping, des taches de peinture, probablement influencées par le travail de Picasso et de Miro, dont ce dernier avait plusieurs expositions à ce moment-là à New York.

7) Quel défi Pollock voulait-il relever ?

Dans sa quête artistique, Pollock poursuit son exploration pour « voiler l’image ». Cependant, il sait que simplement ajouter un voile ne suffirait pas pour réussir sa mission. Bien que sa peinture soit encore trop figurative, il ressent l’attrait de l’abstraction et se sent attiré par les travaux des surréalistes sur les pulsions de l’inconscient. Ce mouvement artistique lui sera d’une grande aide pour dépasser la simple illustration et aller au-delà.

8) La peinture peut-elle n’être qu’une action ?

Les artistes dont les approches artistiques sont similaires à celles de Jackson Pollock sont communément appelés « action painters ». Pour Pollock, l’acte de création est en soi une œuvre, et la peinture, telle une trace, devient simplement le témoin de la rencontre entre l’artiste et le support.

Clément Greenberg soutient que les toiles de Pollock doivent être évaluées en fonction de critères formels et optiques, sans considérer l’importance de l’acte de peindre. La critique Rosalind Krauss et d’autres ont remis en question cette thèse, mais l’œuvre de Pollock demeure une peinture complexe intégrant de multiples sources, fruit de la maturation intellectuelle de l’artiste nourrie par des rencontres artistiques.

9) En quoi consiste le génie de De Kooning ?

De Kooning, peintre américain d’origine hollandaise, a toujours rejeté l’idée de style, la qualifiant lui-même de « supercherie »p.32. Afin d’éviter toute influence, l’artiste a parfois peint les yeux bandés ou avec des gants, cherchant ainsi à atteindre une « neutralité » et à briser les habitudes corporelles. Ainsi, sans possibilité de critiquer l’esthétique en l’absence de critères de référence, l’œuvre de De Kooning exprime l’artiste lui-même.

En tant qu’expressionniste, De Kooning cherche à se libérer de toute référence pour proposer une peinture centrée sur la sensation et l’expérience personnelle de l’artiste, une « peinture spirituelle »p.33 délivrée de l’histoire de l’art.

Cependant, l’auteur rappelle que l’abstraction totale n’existe pas, car des signes identifiables, liés à l’inconscient de l’artiste, ressortiront toujours. 

De Kooning réussira à maintenir un équilibre parfait entre le figuratif et l’informel tout au long de son œuvre.

10) En quoi consiste le génie de Jean-Michel Basquiat ?

Le génie de Basquiat est bien résumé par cette citation de Bernard Millet, proposée par Jean-Luc Chalumeau: « Il a laissé un signe, une parole, une écriture terrifiante et implacable qui ne cesse de raconter des faits de civilisation ; son œuvre montre jusqu’à saturation, des attitudes, des réalités sociologiques complexes et emmêlées, elle décrit des univers jaillis de creusets multiples ; elle n’en finit pas d’être l’incarnation de ce que nous avons été ; elle nous jette au visage des images de cette histoire immédiate qui constitue notre présent »p.34.

Jean-Michel Basquiat est influencé par diverses sources, de l’Expressionnisme Abstrait au tag en passant par la bande dessinée. Conscient de ses origines africaines, il cite l’art égyptien ou des Noubas, un groupe de populations africaines vivant dans une région du sud du Soudan, comme source d’inspiration. Les œuvres de sa première période sont décrites comme des « synthèses de sa mémoire personnelle et de la mémoire collective de sa génération »P.36.

L’autre partie de son succès vient de son art qui est radicalement à contre-courant de son époque. Alors que le Minimalisme et le Pop Art proposent des œuvres lisses et inspirées des papiers glacés, Basquiat y intègre des affiches déchirées, des logos omniprésents et des couleurs vives rappelant les néons publicitaires.

L’œuvre du jeune artiste new-yorkais représente la rue et sa réalité, de la pollution visuelle qui y règne à la diversité culturelle de ses habitants.

III. L’après guerre en Europe

11) Quelle est l’importance de la dernière période de Picasso ?

Dans les dernières années de sa vie, Picasso choisit la peinture comme sujet, qu’il associe au thème du peintre et de son modèle. Il crée une série de plus de 50 toiles sur ce thème pour confronter sa propre peinture à celle de grands maîtres tels que Manet avec ses « Déjeuner sur l’herbe », Velasquez avec les « Ménines » ou encore Delacroix avec les « Femmes d’Alger ». Dans sa quête de repousser les limites de la discipline, il se lance dans une pratique effrénée qui dépasse finalement la tradition picturale.

Picasso finit par créer son propre langage, avec des signes et des idéogrammes qu’il a codifiés lui-même dans une peinture matérielle, épaisse, où les coups de pinceau étaient visibles.

Trois ans plus tard, la peinture matérielle et les symboles deviennent indiscernables, de sorte qu’il est impossible de distinguer les formes et les couleurs. Seuls quelques signes primaires rappelant les dessins d’enfants sont identifiables. Picasso dira : « Il m’a fallu toute une vie pour dessiner comme eux »p.40.

En dessinant comme un enfant, Picasso passa sa vie à chercher à laisser parler le médium peinture, régie par ses propres lois, et à ne pas faire de l’art en se détachant d’un passé artistique. « Il aura relancé les infinies possibilités de la figure et de son inscription dans l’espace du tableau »p.41.

12) En quoi consiste l’importance des œuvres de la dernière période de Matisse et Braque ?

Henri Matisse

Matisse est reconnu comme le « simplificateur des moyens de la peinture »p.43, en utilisant des aplats de couleurs distincts avec des contours nets entre les différentes figures.

Il développe son propre système artistique basé sur les notions de tension, circulation et respiration, qui contribuent à l’effacement de la profondeur spatiale et la perte de repères dans l’espace pictural. Selon l’auteur, tous ces éléments créent une peinture dans laquelle il est impossible de trouver un motif central, le regard se perdant dans l’ensemble. Matisse continue à explorer cette approche pour atteindre un espace « au-dessus de tout motif », un espace illimité, qu’il crée finalement dans la chapelle de Vence, un lieu sacré qui représente pour lui l’idée d’immensité.

Georges Braque

Dans cette même partie, l’auteur présente un autre artiste, Georges Braque, et son œuvre Billard, 1944.

Bien que le billard soit représenté de manière déformée, l’inclinaison de la table rapproche le spectateur de l’objet. Braque cherche à éliminer tout point de fuite vers l’objet afin de « faire avancer le tableau vers le spectateur »p.47. Pour ce faire, il utilise une technique qu’il maîtrise, à savoir le détourage de certaines figures par un cerne blanc, permettant de détacher les formes du fond et de briser l’illusion de profondeur. Cette méthode confère une frontalité quasi abstraite aux figures, qui se retrouvent dans un espace sans relation de perspective les unes avec les autres. Cependant, le rapport entre les couleurs et les formes reste harmonieux et équilibré, ce qui renforce le travail de composition et d’expression des volumes de l’artiste.

13) Pourquoi dit-on que Giacometti, Dubuffet, Bathus et Bacon étaient des “irréguliers” ?

Jean-Luc Chalumeau présente dans cette partie quatre artistes en soulignant leur caractère inclassable et leur positionnement en marge des courants dominants.

Alberto Giacometti

Le premier est Giacometti. Le sculpteur est tiraillé entre les notions de masse et de détail, ce qui l’amène à concentrer sa réflexion sur le visage, perçu comme « centre de toutes les énergies ». Sa vie durant, il chercha la réalité qu’il tenta de capturer dans son travail, une réalité qui, pour certains, représente la quête de quelque chose de plus grand que lui-même, une présence sacrée où les choses n’ont pas de valeur absolue.

Jean Dubuffet

Le second, Jean Dubuffet crée des « non-lieux », des œuvres qui remettent en question la vision humaine et nos croyances. Il aspire à se détacher de l’art et à produire sans être influencé par celui-ci, dans une création autarcique. Selon lui, tout ce que nous pensons voir n’est qu’une pure création de l’esprit, et il n’y a pas de distinction à faire entre les créations de l’esprit et la réalité. Dubuffet considère l’art comme une possibilité de vivre l’expérience du non-être, une expérience spirituelle. « L’œuvre n’a de valeur que dans l’intensité de sa charge subversive, qui s’oppose à l’ordre établi. »

Balthus

L’auteur nous parle ensuite de Balthus, dont la singularité réside dans son abandon de la profondeur simulée grâce à la perspective et au clair-obscur. Pour lui, la couleur n’a pas d’existence en soi, mais le rôle de la peinture est de la transmuer en lumière.

Francis Bacon

Enfin, Francis Bacon utilise ses figures pour répondre à la question de la représentation des forces invisibles. Il parvient à traduire la sensation de la douleur, plutôt que de simplement représenter la violence ou la mutilation. L’auteur dit que Bacon n’est pas figuratif, mais figural, au sens où Lyotard l’entend dans son ouvrage Le Discours, Figure.

14) Soulage est-il proche de l’expressionnisme abstrait américain ?

Alors que l’expressionnisme abstrait se prépare aux États-Unis, une abstraction émerge également en Europe, portée par de jeunes artistes dont Pierre Soulage, déjà reconnaissable par son tracé noir. L’auteur établit un parallèle avec Kline, un jeune artiste américain souvent mis en concurrence avec Soulage. Cependant, Kline, semi-figuratif et influencé par la peinture de genre américaine, se met soudainement à devenir abstrait et à proposer une peinture rappelant celle de Soulage, dont les œuvres étaient exposées pendant cette période à New York. Chalumeau souligne qu’il n’est pas important de savoir qui a été le pionnier, car chaque peinture offre son originalité, dont chacun a su tirer profit.

Soulage, timidement accueilli par le public américain, parle de son travail lors d’une interview et souligne l’importance des influences de peintres tels que Rembrandt, qui créaient du rythme dans leurs coups de pinceau. Chez l’artiste, les traces laissées dans la matière permettent d’imprimer le mouvement du corps, dont la variété crée la lumière.

15) L’art constructiviste et l’art cinétique ont-ils eu des héritiers ?

En Russie, le constructivisme a émergé avec des artistes comme Tatlin, qui avait conçu le projet monument à la IIIème Internationale, une structure faite de tubes métalliques et de verre avec un système mécanique qui lui permettait de tourner. Cependant, l’instauration de la terreur stalinienne empêcha les constructivistes de poursuivre leur travail et beaucoup ont dû fuir le pays.

Il faudra attendre 40 ans pour voir apparaître un successeur avec le mouvement cinétique, qui cherchait à « créer des conditions optiques susceptibles d’impliquer la participation du spectateur »p.58. Bien qu’il n’était pas un héritier direct du constructivisme, le mouvement cinétique permis la création d’œuvres relationnelles qui peuvent être appréciées dans les « relations interhumaines » p.59 qu’elles suscitent ou représentent.

IV. Minimalisme internationale et conceptualisme

16) En quoi les démarche de Jasper Johns et Rauschenberg sont-elles originales ?

Johns et Rauschenberg sont des amis ayant chacun une approche artistique différente. Rauschenberg aborde les concepts avec un esprit ironique, comme lorsqu’il a parodié la gestuelle des expressionnistes abstraits en imprégnant un oreiller et une couverture de peinture dans sa célèbre œuvre Bed de 1955.

De son côté, Johns s’attache plutôt à mettre en valeur les « qualités spécifiques du matériau pictural »p.61 et se concentre sur la « qualité visuelle de ses œuvres »p61. Il cherche à démontrer que la peinture ne peut être ni abstraite, ni figurative, car elle ne peut avoir qu’une signification picturale.

À la manière de Picasso, Johns remet en question la peinture et poursuit une réflexion critique sur celle-ci. Par amour de la peinture, il veut la réhabiliter et crée des « anti-ready made », des bronzes issus de moulages en plâtre, qui sont peints pour rappeler les originaux. Ces sculptures-peintures, réalisées de manière artisanale, remettent en question la réalité en tant que simulacre de celle-ci.

Si l’art avait su utiliser des objets du quotidien pour interroger ce qui fait l’art, Johns, avec ses simulacres de la réalité, ouvrirait la voie à une interrogation de la limite poreuse entre l’art et le non-art.

17) En quoi consiste l’importance historique de Frank Stella ?

Stella avait une particularité qui le distinguait des autres peintres de son époque : il utilisait des bandes noires d’épaisseur égale qu’il appliquait mécaniquement sur ses toiles, et dont l’épaisseur correspondait à celle du châssis même de la toile.

Carl Andre, dans la préface de la peinture en bande, déclara que Stella ne faisait pas de symbolique et que les bandes n’étaient que « le passage du pinceau sur la toile »p.64. Greenberg a utilisé ce texte pour justifier la peinture américaine en se basant sur la planéité du travail de Stella. Cependant, c’est sans prendre en compte l’épaisseur du châssis des œuvres de l’artiste. Les peintures, projetées vers l’avant, ont rompu avec la planéité de la peinture pour entrer dans la troisième dimension, rompant ainsi avec la thèse de Greenberg selon laquelle toute l’histoire de la peinture avait jusqu’alors visé à atteindre une planéité.

18) Pourquoi les minimalistes ne peuvent être dit ni peintres ni sculpteurs ?

Les artistes minimalistes ont choisi d’abandonner la surface plane et bidimensionnelle de la peinture pour amener leurs œuvres dans le monde de la tridimensionnalité. En faisant cela, ils ont ouvert de nouvelles possibilités artistiques en sortant des conventions habituelles de la peinture et de la sculpture.

Greenberg, qui les considérait au départ comme des sculpteurs, ne pouvait accepter leur travail comme de la peinture et demandait à chaque forme d’art de préserver sa propre spécificité. Les minimalistes, quant à eux, refusaient cette idée et considéraient que leur art appartenait au monde de la sculpture, mais aussi à celui de toutes les autres choses matérielles qui ne sont pas considérées comme de l’art.

En rupture avec les caractéristiques esthétiques de la peinture et de la sculpture, Judd, artiste minimaliste, souligna que l’art ne peut être qu’un concept générique qui crée des liens logiques plutôt qu’esthétiques avec l’histoire. Le minimalisme a ainsi contribué à élargir les possibilités artistiques en proposant une troisième dimension qui était libérée de la spécificité de la sculpture et qui a ouvert la voie à de nouvelles formes d’art.

19) Qu’est-ce que l’art conceptuel et le simulationnisme ?

L’art conceptuel est un courant artistique apparu à la fin des années 1960, porté notamment par des artistes tels que Sol Lewitt, Joseph Kosuth et Lawrence Weiner. Cette mouvance artistique puise ses racines dans les prémisses du mouvement de l’art minimaliste, qui visait déjà à la dématérialisation de l’œuvre d’art. Cette tendance a été amorcée dès la fin des années 1950 avec l’exposition du vide de Klein, qui prônait la transcendance de la matière et de l’objet artistique.

L’art conceptuel s’appuie sur cette dématérialisation de l’œuvre d’art en affirmant que l’objet artistique ne peut exister sans matérialité. Le concept devient ainsi le centre de la création artistique, le processus intellectuel devenant plus important que l’objet en lui-même.

C’est dans cette optique que naît le simulationnisme, une forme d’art qui rejette l’idée d’une œuvre originale et qui travaille exclusivement sur des copies ou des reproductions. Les artistes simulationnistes revendiquent leur appropriation des codes esthétiques et de production de l’œuvre originale, tout en mettant l’accent sur le processus de création plutôt que sur la production en elle-même.

V. Le Pop art, les Néo-pop et les Anti-pop

20) Andy Warhol s’est-il contenté de reproduire la société industrielle américaine ?

Lorsque Andy Warhol est apparu sur la scène artistique, le Pop Art était déjà présent, avec des artistes tels que Rauschenberg et Jasper Johns qui utilisaient des signes populaires dans leurs œuvres. Cependant, ces artistes ont montré à Warhol que l’art pouvait désormais intégrer n’importe quel sujet. Warhol s’est alors emparé “avec voracité des facteurs de pollution visuelle les plus vulgaires et les plus envahissants”p.74 de la pollution visuelle de la société américaine pour créer ses œuvres.

Warhol n’a pas seulement reproduit la société industrielle américaine, mais a également adopté une démarche similaire à celle des artistes abstraits en utilisant des techniques de production en série pour créer ses œuvres. Cette approche de la production en série a également été utilisée par des artistes abstraits américains tels que Jasper Johns et Robert Rauschenberg pour créer des œuvres d’art multiples.

Warhol a réussi à « éclater la hiérarchie des images artistiques », ce qui a modifié notre champ de perception et ouvert de nouvelles possibilités. Selon William Burroughs, « une boîte de conserve, observée avec un œil lucide, peut devenir aussi miraculeuse qu’une comète. »p.76

21) En quoi consiste l’univers du Pop art ?

Contrairement à une idée reçue, le mouvement artistique du Pop art ne vise pas à dénoncer la société industrielle, mais plutôt à affirmer que la qualité de l’objet représenté ne détermine pas la valeur de l’œuvre d’art en question.

Le Pop art est né d’une prise de conscience de la limite de l’expressionnisme abstrait et cherche à la dépasser en intégrant des objets du quotidien dans la peinture, afin d’intégrer la « réalité sociologique dans l’art »p.78.

En démontrant que la qualité de l’œuvre d’art est indépendante de la qualité de l’objet représenté, le Pop art montre que la limite ne réside que dans l’appréciation personnelle de l’artiste.

21) En quoi Motherwell fut-il un “anti-pop” ?

Motherwell est présenté comme un intellectuel engagé politiquement qui défend ardemment ses idées. Pour lui, l’artiste doit avoir une liberté individuelle et une indépendance créative. Bien qu’il s’oppose à l’art politique et à l’art pour l’art, il prône néanmoins une « esthétisation de la politique »p.79.

Motherwell considère que l’art est socialement déterminé et doit donc évoluer pour s’adapter à la société. En tant qu’internationaliste, il croit en une peinture qui ne se limite pas à un style propre à une culture, mais qui émerge de l’individu et des questions qu’il se pose.

Cependant, Motherwell est souvent considéré comme le représentant principal du « style américain » qui sera reconnu à l’échelle internationale, bien qu’il reconnaisse lui-même l’existence de ce style.

Son plus grand défi sera de défendre la spécificité de sa peinture face aux autres artistes américains de son époque, notamment les Pop. S’il ne devait y avoir qu’un seul style américain, ce serait le sien.

23) Le Nouveau réalisme a-t-il été une réplique au Pop art ?

Alors que le mouvement Pop art prenait son essor outre-Atlantique, en France émergeait le Nouveau Réalisme, qui avait pour ambition de « se référer à l’objet en tant que tel et non à sa représentation automatique », contrairement aux artistes Pop.

Dans un premier temps, les affichistes ont déchiré des affiches dans la rue pour nier et remettre en question la mythologie qui entoure l’acte de création.

Par la suite, Yves Klein a approfondi les recherches des affichistes en voulant libérer l’art de toutes les contraintes techniques pour atteindre son essence: l’émotion pure. La réalisation de monochromes a été un moyen pour Klein de dépasser les relations qui existent entre les différents éléments de l’œuvre. Désormais de couleur unie, sans distractions possibles, toute « la sensibilité cosmique » de la peinture pouvait se révéler.

L’artiste a poursuivi ses expérimentations à travers plusieurs séries d’œuvres, dans sa volonté d’abolir le savoir-faire du peintre au profit de l’idée créatrice qui précède le processus de création.

VI. Tendances Européennes des années 1970

24) Comment parvenir à la “simplicité de la peinture” ? Le cas Martial Raysse

Martial Raysse, cofondateur du Nouveau réalisme, a abandonné la peinture pour devenir rapidement le principal représentant du Pop art en Europe. Enfermé dans un monde de l’art international régi par des stratégies et des enjeux, il a tout arrêté après Mai 68. Il cherchait maintenant à faire de l’art sans les contraintes imposées par la scène internationale.

Raysse est revenu à une peinture de tradition française, où les œuvres aseptisées et lisses ont laissé place à une peinture « mal peinte », où les traces de ses doigts sont visibles, mais dont les sujets évoquent la simplicité et la paix.

Bien qu’il puisse être considéré à tort comme naïf en raison de ses sujets légers, Raysse a choisi de représenter la beauté de la vie et de la gaieté. Il affirme que « peindre pour être heureux » et « chercher à faire du bien, ce n’est pas être bien ».p.89

25) Qu’est-ce que l’art corporel est l’actionnisme ?

Les réflexions précédentes de l’art ont amené les artistes à dissocier le métier d’artiste à la stricte production d’œuvre. Des artistes tels que Journiac, Muehl ou Manzoni ont proposé une forme d’art qui implique le corps et ses productions, impossible à retranscrire par la peinture.

L’auteur remet en question l’intérêt réel de ces productions artistiques quant à leur motivation à dénoncer la marchandisation du corps de l’artiste.

L’artiste Gina Pane, par exemple, considère son corps mutilé en public comme son œuvre. Elle s’intéresse particulièrement aux réactions du public qui, selon elle, révèlent les tabous de la société sur le sang et la chair, créés par la religion. Elle souhaite ainsi montrer « cette part d’irrationnel que la culture a pour tâche de censurer »p.90.

Cependant, certains artistes corporels ont franchi les limites de l’art et de ce que la société permet et autorise, en transgressant les barrières éthiques et morales de celle-ci.

26) Qu’est-ce que la peinture pour les artistes de support surface ?

Le groupe d’artistes connu sous le nom de « Support Surface » a une conception particulière de la peinture. Ils considèrent que la peinture doit être une expérience en soi, sans que le spectateur ait à projeter ses propres pensées ou divagations oniriques. Pour eux, la théorie picturale doit être basée sur le matérialisme dialectique et la psychanalyse, permettant ainsi à la peinture de rejoindre l’histoire et la lutte des classes. Ils considèrent que la révolution doit transformer non seulement le thème pictural, mais également la peinture elle-même.

D’après eux, la couleur n’est pas simplement un élément esthétique, mais une matière chargée de signification. Leur objectif est de s’échapper du tableau traditionnel et d’offrir une expérience de soi plutôt qu’une image reconnaissable.

Selon Marc Devade, l’un des membres de « Support Surface », la peinture est avant tout une expérience de soi, et non la présentation d’une idée préconçue. Leur idée était donc d’échapper au tableau traditionnel en offrant une surface qui ne soit pas identifiable ou reconnaissable comme un style particulier.

La couleur est ainsi au cœur de leur travail, mais pas comme un élément décoratif, plutôt comme une matière porteuse de sens.

27) Qu’est-ce que l’arte povera ?

L’arte povera est un mouvement qui a vu le jour en 1967 lors d’une exposition dans une galerie de Gênes en Italie. Selon ce mouvement, l’interprétation et l’appréciation d’une œuvre ne peuvent exister qu’en relation avec les matériaux utilisés et l’action même de disposer ces matériaux. Chaque élément de l’œuvre ne renvoie qu’à lui-même.

Fabro, l’un des artistes associés à l’arte povera, explique que l’œuvre ne se trouve pas simplement dans l’objet visible, mais dans la relation entre l’objet et les commentaires qui l’accompagnent. Selon lui, la lecture de l’œuvre ne peut être appréhendée qu’à partir de sa réalisation même et de tout le travail qui a été fait pour la créer.

Avec l’arte povera, l’objet visible n’est que le signe d’une expérience plus vaste de l’œuvre, qui s’exprime à travers la relation entre l’objet et son contexte.

28) Qu’est-ce que la peinture matiériste ? Le cas Tàpies

Chalumeau explore la peinture Matiériste à travers l’exemple du peintre Tàpies. Pour mieux appréhender cette forme d’art, l’auteur présente la vie de Tàpies, soulignant son engagement politique de gauche ainsi que son désir de créer un nouveau langage plastique qui s’oppose au naturalisme descriptif du « réalisme socialiste ».

L’artiste a pour ambition de restaurer la puissance de la matière brute et de la peinture en les confrontant, créant parfois des réminiscences de la guerre civile espagnole qui a laissé une empreinte indélébile sur l’artiste.

Ce qui distingue Tàpies c’est son souci constant de donner du sens dans son travail, plutôt que de simplement produire une œuvre matiériste.

29) En quoi Garouste, Barceló et David Salle sont-ils des post-modernes ?

Gérard Garouste

Le premier artiste présenté dans cet article est Garouste. Ce peintre s’inspire de l’histoire de la peinture pour créer ses œuvres, mais il évite toute citation explicite. Selon lui, la peinture ne peut pas être entièrement expliquée, et une part de spontanéité doit être présente. Pour empêcher toute lecture symbolique, Garouste a mis en place un procédé plastique qui empêche toute reconnaissance directe de ses sources, ce qui peut parfois donner une impression de déjà-vu.

Miquel Barceló

Le deuxième artiste présenté est Barceló, qui se distingue par son travail sur les caractéristiques physiques de la peinture et des matériaux qu’il utilise.

Sa peinture éclabousse et coule à la manière de Jackson Pollock, mais le résultat est illusionniste, avec des motifs qui rappellent la peinture Baroque ou de la Renaissance. Barceló ne cherche jamais à représenter parfaitement son sujet, mais à utiliser les accidents du tableau pour faire émerger d’éléments abstraits des images reconnaissables.

David Salle

Enfin, David Salle cherche également à se libérer des pouvoirs d’évocation historiques que véhiculent certaines images ou certains styles.

Bien qu’il soit l’un des héritiers des artistes qui croient en une « table rase » de l’art, il reconnaît qu’une telle chose est impossible. Il crée alors des juxtapositions d’images sans rapport du point de vue du style ou du récit, évitant ainsi toute assimilation à un style précis de son œuvre, mais qui évoquent néanmoins des références historiques.

Dans l’ensemble, ces artistes cherchent à créer une peinture qui s’inscrit dans une continuité historique, tout en étant ancrée dans leur époque et en prenant en compte l’évolution de l’art. Leurs sujets rappellent ainsi l’histoire de l’art tout en proposant des visions nouvelles et personnelles.

VII. L’affirmation de la peinture et de la sculpture

30) Peut-on défendre la peinture sans peindre ? Le cas Buraglio

Buraglio est un artiste peintre qui ne suit pas les méthodes traditionnelles de la peinture. Il considère que la peinture est devenue problématique, sans plus de précisions sur les raisons de cette affirmation. Ce problème l’incite à récupérer des matériaux bruts provenant de chantiers ou de la rue, qu’il utilise comme base pour ses créations.

Ce qui intéresse particulièrement l’artiste, c’est la forme des matériaux, qu’il coupe parfois pour les « assembler » en respectant les lois de la peinture qu’il considère comme un facteur de réussite pour ses tableaux. Burgalio, n’utilise pas les objets bruts pour leur fonction première, comme c’est le cas pour les ready-made, mais pour leur matérialité et leurs qualités esthétiques visuelles pures.

31) Qu’est-ce que la figuration narrative par rapport à la nouvelle figuration ?

Dans les années 1960, les peintres Rancillac et Télémaque ont exprimé leur préoccupation face à l’irruption du Pop art à l’international. Ils ont proposé une alternative en organisant une exposition à Paris sur les mythologies quotidiennes. C’est ainsi que la figuration narrative est née, définie par Gérald Gassiot-Talabot comme « toute œuvre plastique qui se réfère à une représentation figurée dans la durée, par son écriture et sa composition, sans qu’il y ait toujours à proprement parler de récit »p.108. Cependant, malgré cette définition formelle, ce courant a formé un autre groupe qui voulait « redonner à la peinture une fonction politiquement active »p.108 : la Nouvelle Figuration.

Ce mouvement ne cherchait pas à être explicitement politique, mais la subversion de ses œuvres venait de leur potentiel esthétique. La Nouvelle Figuration représentait son époque et n’épargnait aucun événement de son temps. Elle dénonçait et critiquait à l’opposé de la neutralité du Pop art.

32) L’origine de la figuration narrative est-elle aussi italienne ? Le cas Recalcati

Dans les années 1960, Recalcati proposait une peinture d’une simplicité radicale, qui contrastait avec l’esthétisme de la peinture abstraite italienne de l’époque. Il voulait créer un langage figuratif autonome, en phase directe avec le contexte social et politique de son temps. Avec Aillaud et Arroyo, il a proposé une peinture collective, évitant ainsi toute signature personnelle.

Leur intention était de dénoncer l’œuvre de Duchamp, qui était devenue « un pion sur l’échiquier de la culture bourgeoise »p.112, témoignant de leur engagement politique et social. C’est ainsi que les artistes italiens se sont inscrits dans la figuration narrative. En s’attaquant au monument Duchamp et à ce qu’il était devenu, le trio a suscité l’intérêt et « soulevé les bonnes questions sur le rôle de l’art dans la société capitaliste »p.113, permettant ainsi à la figuration narrative de faire une entrée fracassante dans l’histoire de l’art.

33) Qu’est-ce que la peinture politique? Le cas Rebeyrolle, Cueco et Rancillac

Paul Rebeyrolle

Rebeyrolle est un artiste qui met en avant l’horreur à travers ses peintures. Ce qui est remarquable dans son travail, c’est la force et la colère qu’il parvient à transmettre. Il souhaite nous faire ressentir et communique une énergie qui lui permet de transmettre son message. Comme le soulignait Foucault, « lorsqu’elle fait passer une force qui crée de l’histoire, elle est politique »p.114, et Rebeyrolle parvient à faire passer une telle force à travers sa peinture.

Ce qui a fait de lui l’artiste politique préféré de Sartre, c’est principalement son refus de l’abstraction et sa représentation réaliste et terre-à-terre des événements qu’il dénonce. Sa peinture dégage une force qui nous permet de ressentir toute l’intensité et la lourdeur d’un combat; elle ne se contente pas de rappeler un événement, mais nous montre toute son ampleur.

34) Qu’est-ce qu’une peinture nietzschéen ? Le cas Fromanger

La peinture nietzschéenne tire son inspiration des théories du philosophe Nietzsche, qui considère le peintre comme un personnage aristocratique capable d’imposer ses valeurs au monde à travers son art, sans avoir besoin de les justifier ou de les argumenter.

L’artiste Fromanger adhère pleinement à cette pensée, considérant que l’art a une valeur bien supérieure à celle de la vérité car il exprime la vie en elle-même, conformément à la philosophie nietzschéenne selon laquelle il n’y a pas de faits mais seulement des interprétations.

Pour Fromanger, l’art doit remettre en question les conventions esthétiques et mettre en avant l’expression individuelle de l’artiste. La seule vérité qui compte est celle de l’artiste, qui vient de ses différences et de son vécu. Ainsi, lorsqu’on contemple une œuvre de Fromanger, on ne peut pas savoir ce que représente précisément chaque couleur, mais on peut ressentir le vécu de l’artiste et ses propres interprétations.

35) En quoi consiste l’originalité des images de Monory ?

Monory utilise des images de la publicité ou du cinéma, inspirées de ses photographies personnelles, pour créer son œuvre. Il choisit de peindre ces éléments en bleu, peut-être pour suggérer une impression de lointain ou de nostalgie, et pour créer une séparation entre le rêve et la réalité.

Les images qu’il utilise sont des manifestations de ses expériences personnelles, présentes ou passées. Dans ses toiles, les éléments de l’imaginaire et de la réalité se mélangent, tout est à la fois vrai et faux.

Malgré cela, la violence dans ses œuvres est allégorique, reflétant les angoisses et la peur engendrées par la photographie, et plus largement par les systèmes de production mécanique propres à l’idéologie capitaliste. Pour Monory, la peinture doit se poser la question du réalisme pictural face à la photographie, qui capture l’image réelle.

36) En quoi Télémaque, Arroyo, Guyomard et Erró sont-ils des résistants ?

Hervé Télémaque

Télémaque est un artiste qui se positionne entre le Pop art et l’expressionnisme abstrait, cherchant à transcender ces mouvements en y incorporant certains codes tout en restant fidèle à sa propre vision artistique. Malgré cela, il est capable de maintenir un lien avec son époque, ce qui lui permet de donner un sens à son art.

Edouardo Arroyo

Arroyo, quant à lui, remet en question les formes artistiques en déconstruisant les mythes véhiculés par la peinture d’histoire. Il choisit soigneusement les parties des tableaux qui l’intéressent et les combine avec d’autres images ou mots pour renforcer les valeurs qu’il souhaite remettre en question. L’humour présent dans ses œuvres contribue à accentuer cet effet.

Gérard Guyomard

Guyomard, pour sa part, crée des œuvres figuratives difficiles à interpréter. Les figures se mélangent les unes aux autres, rendant leur reconnaissance incertaine. En tant que peintre narratif, il est capable de résister aux tendances de l’art contemporain en mêlant ses thèmes précédents et ses procédés.

Erró

Enfin, Erró est connu pour ses peintures d’Histoire complexes, qui incorporent de nombreuses références et figures. Il crée des arrangements qui guident le regard du spectateur à travers la narration, bien que celle-ci se perde souvent dans une masse complexe d’informations, semblable à une « amnésie générale ». Erró affectionne les allusions aux problèmes politiques et est capable de peindre sur un thème sans jamais se répéter.

37) En quoi consiste la solidarité du peintre et de la création chez Velickovic ?

Velickovic, un peintre yougoslave, a été marqué à jamais par les horreurs de la guerre durant son enfance. Il a assisté à des scènes effroyables telles que des résistants de son quartier pendus aux lampadaires par les nazis. Ces images ont profondément traumatisé l’artiste et ont eu une influence sur son travail artistique.

Dans ses peintures, on peut voir des corps masculins déformés, métamorphosés en animaux, ainsi que des femmes en train d’accoucher, représentées en proie à une douleur extrême alors qu’un rat attaque leur visage.

Pour Velickovic, la peinture est un moyen de libérer ces images de son esprit et de les fixer autre part.

38) L’art de Klasen est-il pessimiste ?

Klasen utilise ses propres photographies de la vie quotidienne, ainsi que des images provenant des médias de masse et des magazines, pour les détourner de leur sens initial et dénoncer « un monde de plus en plus envahissant d’objets et d’images qui conditionnent fondamentalement notre vie quotidienne »p.133.

Pour créer ses œuvres, l’artiste utilise une technique d’aérographe qui naturalise l’image et élimine les signes d’une intervention manuelle sur la toile. Cette méthode renforce la vision de la peinture de Klasen, pour qui peindre est un acte lucide qui exclut tout lyrisme expressionniste et implique une distance constante.

Cependant, Klasen n’aspire pas à créer une peinture purement contemplative qui magnifierait ses sujets ; au contraire, il veut que ses œuvres encouragent la réflexion.

Bien que l’esthétique de Klasen repose sur l’esthétisation de l’image lisse et presque aseptisée, les éléments qu’il utilise peuvent provoquer une certaine angoisse et de la peur. Toutefois, il ne veut pas d’une peinture perçue comme pessimiste. Au contraire, la particularité de son art est de jouer avec des images qui véhiculent les problèmes et les angoisses de notre monde, mais qui, lorsqu’elles sont mises en relation avec des signes et des symboles, offrent une autre lecture, une échappatoire possible, un espoir.

39) En quoi la peinture de François Rouan et celle de Fabienne Verdier sont-elles symptomatiques d’un retour aux traditions ?

François Rouan

Rouan, un peintre français, crée des entrelacs et des bandes qui apparaissent comme tressées. Il précise que ses œuvres ne sont pas des structures car elles ne font pas appel à la troisième dimension, mais sont plutôt des peintures qui opèrent dans une autre direction, sur le plan bidimensionnel de la toile : la diagonale. Son travail s’inscrit dans une volonté de restructurer la peinture face à la déstructuration initiée par les avant-gardes.

Selon le critique américain Edward Fry, Rouan perpétue une tradition nationale qui reprend la peinture moderniste française, arrêtée depuis près de 30 ans au nom d’un « art international stérilisant ». Fry rappelle que le modernisme et la peinture française sont l’héritage d’un art européen du XIXème siècle, lui-même à l’origine du style américain qui n’aurait pas existé sans le cubisme et le surréalisme.

Après les années 1980, Rouan abandonnera ses tressages. Marc Le Bot a résumé son travail en disant qu’il arrache l’art à l’ordre de la valeur et au terrorisme du sens imposé pour le restituer au plaisir de voir.

Fabienne Verdier

Fabienne Verdier est une artiste qui a consacré près de 10 ans à l’étude de l’art de la peinture chinoise auprès de grands maîtres. Pour mieux comprendre la spécificité de l’artiste, il convient de savoir que la peinture chinoise était historiquement partagée entre deux tendances : une tendance plutôt académique d’un côté et une propension à l’individualisme de l’autre.

Contrairement à ce que certains affirment, Fabienne Verdier n’a pas mélangé l’art occidental avec l’art oriental. Elle a su plutôt faire le lien entre plusieurs milliers d’années d’art chinois en utilisant les deux tendances principales de cet art.

Si l’artiste parvient à nous toucher, c’est sans doute parce que les interrogations de l’art peuvent être universelles et intemporelles, constituant peut-être l’essence même de l’art.

40) Les expressionnistes allemands ont-ils mené un combat contre le minimalisme international ?

Plusieurs artistes allemands des années 1970-1980 ont cherché à se défendre contre l’internationalisme minimaliste en se tournant vers la sculpture. Ils ont vu en elle un moyen de réintégrer toute une tradition où les peintres étaient au centre, initiée au début du XXème siècle par des artistes tels que Picasso, Matisse, Degas ou encore Gauguin.

Ces expressionnistes allemands cherchaient à exprimer leur subjectivité à travers leur peinture, en renouant avec la matérialité et la gestualité de cette forme d’art.

La sculpture est devenue pour eux un moyen de résistance face à l’imposition de l’opinion dominante en matière d’art, une façon de manifester leur révolte à la manière des esprits avant-gardistes qui les ont inspirés.

41) Comment expliquer l’extraordinaire succès d’Anselm Kiefer ?

Il est probable que la renommée d’Anselm Kiefer soit due à l’ambiguïté des messages que transmet son œuvre. L’artiste allemand explore des thèmes et des symboles liés à l’histoire allemande, parfois difficiles à regarder. Kiefer estime que pour un artiste allemand, il est difficile de se débarrasser des aspects les plus terribles de l’histoire de son pays, d’où la présence récurrente de ces thèmes dans son travail.

Il est toute de même légitime de se demander quelle est la véritable intention de l’artiste, et si ses admirateurs ne cherchent pas à justifier son œuvre. Selon une thèse, Kiefer s’inspirerait et citerait les nazis pour « intégrer leur démence en lui afin de mieux la comprendre »p.145, dans le but de la rejeter. Cependant, cette thèse est sujette à débat, car certains travaux ne fournissent pas d’éléments qui prouvent que l’artiste ne fait pas l’apologie du Führer.

Il est possible que l’artiste, conscient des difficultés à se faire une place dans le monde de l’art, ait volontairement utilisé des transgressions pour perturber le spectateur et faire du bruit pour gagner en visibilité.

42) Peut-on être à la fin contemporain et anti-moderniste ? Le cas Gilbert et George 

Gilbert et George sont deux artistes qui considèrent leur travail comme une expression de leur unité plutôt que d’individus distincts. Depuis leur rencontre, leur œuvre a toujours été créée conjointement, sans exception. Pour eux, leur art est la vie, et en tant qu’artistes, ils ont beaucoup à exprimer. C’est pourquoi ils se mettent en scène comme des sculptures humaines, au centre de leur travail, en opposition à l’idéologie formelle du minimalisme international.

Les deux artistes détestent également le modernisme, qu’ils considèrent comme réservé à une élite d’initiés. Leur objectif est de créer un art accessible à tous, même à ceux qui n’ont pas de connaissances en art. Ainsi, leurs œuvres ne font pas référence à d’autres artistes ou au monde de l’art, mais plutôt à leur propre vie, en résonance avec la vie de leurs spectateurs. Leur art reflète toutes les facettes de la vie, y compris les aspects sombres tels que la guerre, la violence et les conflits.

43) Qu’est-ce que la “nouvelle sculpture anglaise” ?

La sculpture apparue dans les années 1980, baptisée « nouvelle sculpture anglaise », n’était pas techniquement nouvelle, bien que son esthétique moderniste ait été reconnue depuis plusieurs décennies. D’autres artistes à travers le monde ont adopté une approche similaire à cette époque.

Dans ces années là, Richard Long est probablement l’artiste anglais le plus connu. Il retirait toute trace d’activité humaine pour créer des arrangements géométriques informels. Seulement, les jeunes sculpteurs anglais trouvaient son travail trop idéaliste et s’inspiraient davantage de Carl Andre, qui affirmait que « la sculpture doit avoir un rapport démontrable avec d’autres œuvres que l’on appelle sculptures » p.152

L’approche de De Beuys a également attiré leur attention, car il utilisait le matériau, l’image et le processus pour donner du sens à son œuvre. En utilisant des matériaux transformés par l’homme ou des objets, la sculpture anglaise remettait en question la nature artificielle créée par l’homme et donnait du sens à son contenu.

VIII. Les annonciateurs d’un nouvel art

44) En quoi consiste l’importance historique de Beuys ?

Joseph Beuys utilise des objets et des symboles pour faire des allusions mythiques lors de ses performances, qui servent à proclamer des « vérités éternelles ». On peut supposer qu’il a utilisé cette technique pour annoncer la fin de la « mission humaine et sociale » de l’Église et la libération de l’individu.

L’artiste se concentre sur des matériaux plus modestes qui le situent dans une modernité plus radicale. Il se décrit comme un prolétaire, c’est-à-dire qu’il considère qu’il a la mission de rendre visible la « force du travail de l’homme en général ». Cette tâche est longue et fastidieuse, mais elle se reflète dans son travail artistique.

45) Quelle différence y-a-t-il entre le travail de Buren et le minimalisme ?

Daniel Buren utilise les bandes de peinture dans ses œuvres, non pas comme un moyen de simplification ou de purification de l’art, mais plutôt pour explorer un vocabulaire plus riche. Contrairement aux artistes minimalistes qui cherchaient à remettre en question le geste et le tableau unique, Buren se sert de l’utilisation du même matériau, du travail in situ, et du travail temporel pour rendre son art incompatible avec la peinture et ses codes.

Les bandes de Buren n’ont pas de valeur en elles-mêmes, elles sont simplement neutres et n’évoquent rien. Mais cette neutralité leur permet de prendre tout leur sens lorsqu’elles sont mises en contexte. Leur puissance réside dans leur capacité à révéler le lieu où elles sont exposées. Le travail in situ ne cherche pas à représenter le lieu, mais plutôt à en reprendre les caractéristiques, créant ainsi une relation unique avec l’espace.

En explorant cette relation entre le lieu et l’outil visuel, Buren a changé la façon dont l’art était compris. Il a montré que la forme n’était pas la seule condition de communication. Cette approche novatrice a ouvert la voie à un nouveau type de fonctionnement artistique, marquant une étape essentielle dans la réflexion contemporaine sur l’avenir de l’art.

46) Y-a-t-il toujours une tradition de l’avant garde en Russie ?

En 2004, lors de la huitième foire internationale de Moscou, la Russie s’est affirmée comme une place importante dans le monde de l’art. Après la chute du mur de Berlin, un premier groupe d’artistes a remis en question les dogmes politiques, philosophiques et moraux de l’époque, sans pour autant chercher un renouvellement profond. Cet art était assez « sage », allant de l’expressionnisme poétique à la narration sociale.

C’est surtout le post-utopisme qui a poussé plus loin cette remise en question. Inspiré des périodes stalinienne et post-staliniennes, caractérisées par l’art stalinien, les artistes post-utopistes reprennent cet art et proposent leur propre utopie, leur donnant parfois une mythologie universelle, puisque sa base l’était également. Ils critiquent à travers leur travail à la fois l’artiste russe, dont l’esprit est encombré de son passé, et l’impasse dans laquelle l’Occident se trouve avec l’art contemporain, bloqué dans une idéologie.

47) La photographie peut-elle être aussi sculpture ? Les cas Starn et Becher

Doug et Mike Starn

Les frères Starn utilisent des photographies d’œuvres de l’histoire de la peinture non pas simplement pour les reproduire, mais plutôt comme matière première pour leur création. Ils ne se considèrent ni peintres, ni sculpteurs, ni photographes, mais plutôt comme des artistes utilisant la photographie. Ils détournent la photographie en « assemblant » et superposant des images. Les deux frères décrivent leur travail comme proche de la sculpture en raison de sa méthode et de son ampleur monumentale.

L’œuvre est construite à partir de clichés représentant des fragments d’un tout qui, une fois assemblés, superposés et modelés, donnent vie à une œuvre complète.

Hilla et Bernd Becher

De leur côté, Hilla et Bernd Becher travaillent sur la photographie, plus précisément sur celle de certaines architectures industrielles américaines qui sont en voie de disparition. Il faut noter que leurs photos ne sont pas simplement documentaires. Les Becher suppriment toute présence humaine de leurs clichés et mettent en scène les architectures de manière quasi-maniaque.

Ce qui confère une dimension sculpturale à leurs photographies, c’est leur agencement en série et leur variation sur de grands panneaux. Leur œuvre « apparaît alors comme une véritable anthropologie visuelle d’une époque et de son miroir métaphysique »p.164.

48) Y-a-t-il des artistes au-delà de toute classification ? Les cas Boltanski, Lavier et Raynaud

Christian Boltanski

Boltanski est un artiste dont le thème central est la peur du passé et l’obsession de la disparition et de la mémoire. Dans son travail, il évoque le « je », la personne singulière dont l’histoire (comme les événements de la Première Guerre mondiale) interpelle les autres. Ce sont des souvenirs collectifs qui appartiennent à un passé commun.

En effectuant ce travail de mémoire collective, Boltanski montre que l’individu participe à celui-ci mais s’oublie et se perd dans le grand ensemble, créant ainsi une sensation angoissante et de fatalité face à la mort.

L’œuvre de Boltanski est unique et ne peut être étiquetée. L’artiste lui-même ne se considère pas comme un artiste contemporain, mais cela ne l’a pas empêché de jouir d’une reconnaissance internationale.

Bertrand Lavier

Bertrand Lavier est un artiste français qui a fait ses débuts dans le monde de l’art par la recherche de l’inconnu. Dès le début de sa carrière, il avait pour objectif que ses œuvres soient immédiatement compréhensibles.

L’artiste utilise une technique de recouvrement d’objets du quotidien avec une épaisse couche de peinture, mais leur fonctionnalité reste intacte. Il réussit ainsi à sortir ces objets de leur vie quotidienne et à les intégrer dans l’art par la peinture.

Lavier a également réussi à faire disparaître l’identité des objets en les exposant les uns sur les autres grâce à leur dualité, de sorte que le spectateur perçoit l’ensemble comme une seule entité.

Jean-Pierre Raynaud

Une grande partie de l’œuvre de Raynaud s’est développée autour d’un psychodrame : à l’âge de 26 ans, il a divorcé et a tenté de se réapproprier son corps. Il a également achevé la construction de sa maison en la recouvrant du sol au plafond d’une faïence blanche. L’artiste s’est senti pris dans un engrenage qui a duré 15 ans, période pendant laquelle il s’est enfermé dans une solitude extrême avec pour seul repère le carrelage blanc de sa maison. Toute son oeuvre est marquée par le carreau blanc, qui est devenu sa signature.

Ce n’est qu’après avoir pris la décision de repenser sa maison en y incorporant des ouvertures que son travail a changé. La lumière extérieure l’a frappé comme une libération, et il a créé les vitraux de l’abbaye de Noirlac. Il a utilisé un verre blanc qui laisse passer la lumière, symbole d’une certaine pureté et faisant également référence au blanc de son carrelage qui lui est cher.

L’objet commun est ainsi transformé par sa volonté pour devenir sacré. Tout l’art de Raynaud réside peut-être dans cette capacité à changer la valeur des matériaux quotidiens en les faisant entrer dans une autre dimension.

49) La vidéo est-elle un art à part entière ?

Pendant les années 1960 et 1970, Nam June Paik est resté un pionnier et un artiste solitaire dans le milieu de la vidéo. Cependant, c’est dans les années 1980 que la première génération d’artistes vidéo non-performers a émergé, avec comme représentants caractéristiques Bill Viola et Shirin Neshat.

Bill Viola

Bill Viola s’est fait connaître grâce à l’utilisation de grands écrans plats reconstituant l’esthétique de la peinture des grands maîtres à l’aide des technologies et des techniques vidéo de l’époque. Il a mis en scène les passions du Christ avec des acteurs, utilisant des procédés propres à la vidéo tels que l’accélération et le ralentissement de l’image pour souligner leurs expressions et mettre en avant ce qu’a ressenti le Christ. Tout l’art de Viola consistait à utiliser les caractéristiques propres à la vidéo pour proposer une émotion et des sensations que seule la vidéo peut procurer, et que l’art doit nous offrir.

Shirin Neshat

Shirin Neshat, artiste iranienne, propose des installations vidéo qui mélangent musique, chant et vidéo présentées sur deux écrans qui se font et se répondent.

Dans « Rapture », l’artiste oppose deux écrans : l’un montre 125 femmes voilées dans un désert et l’autre montre 125 hommes en chemise et pantalon se trouvant dans une forteresse. Les deux groupes échangent par des cris mais jamais simultanément, lorsque l’un fait du bruit, l’autre se tait. À la fin, quelques femmes prennent le large dans une petite barque laissant le sentiment qu’elles sont condamnées.

Shirin Neshat ne donne pas d’indication ni ne mentionne d’éventuelles revendications politiques, mais se sert de la vidéo pour nous montrer. Ce qui n’a pas empêché le gouvernement de son pays de la condamner pour son travail. Selon elle, la vidéo est le mode d’expression qui permet d’absorber le plus le spectateur.

50) Conclusion : Quel avenir pour l’art ?

Peut-on espérer que l’art occidental sorte de la confusion qu’il connaît depuis des décennies ? Bien sûr, il y a des artistes intéressants aux quatre coins du monde, dont les productions et les questionnements « répondent aux canons de l’art contemporain »p.172.

En Afrique, certains artistes proposent des œuvres qui mêlent des techniques locales et occidentales, tout en dénonçant les inégalités entre les pays du sud et du nord, parfois avec des formules provocatrices, comme c’est le cas de l’artiste Toguo. La dénonciation et l’engagement, qui sont des thèmes chers à l’art contemporain, n’ont pas de frontières.

Depuis les années 1990, l’art vidéo connaît un grand essor, notamment grâce à l’arrivée des ordinateurs. Peut-être que l’art va entrer dans une nouvelle ère ? De nombreux artistes comme Michaël Gaumnitz, Gudrun von Maltzan, Thomas Porett ou encore William Latham utilisent l’outil informatique pour modifier l’image ou générer des œuvres en temps réel.

L’artiste Edmond Couchot proposait même des expériences interactives où le public pouvait poser des questions à un ordinateur qui leur répondait presque instantanément.

Cependant, Régis Debray se pose des questions sur les limites de cet art, car le logiciel ne peut être considéré comme une œuvre en soi. C’est avant tout un outil qui prévoit tout, alors que l’art contemporain se base sur l’accident et la surprise. Le techno-art peut poser des questions, mais il ne peut pas être la réponse. Il sera plutôt une des réponses que l’art peut se poser.

Les institutions et les collectionneurs qui dominent l’économie de l’art contemporain définissent celui-ci Malheureusement, ces acteurs ne possèdent pas forcément une connaissance profonde de l’art. Heureusement, les artistes modernes continuent de contester les normes établies, d’innover et de surprendre. Leur présence rassure quant à l’avenir de l’art.

Conclusion personnelle

Je vous avez prévenu, cet article était un peu long, mais j’ai tenu à détailler chaque partie pour que mes résumés répondent à toutes les questions et pour que vous puissiez comprendre les spécificités des mouvements, courants et démarches des artistes présentés. Je ne voulais rien laisser de côté.

Le livre « Histoire de l’art contemporain » de Jean-Luc Chalumeau permet de parcourir l’histoire de l’art du début du XXème jusqu’au début du XXIème siècle. Sa grande force réside dans l’analyse des pratiques artistiques et des mouvements, en les replaçant dans leur contexte artistique, social et politique. On se rend compte que l’art est un dialogue, une série de réponses et de contre-réponses, en réponse aux questions d’une époque, d’un lieu et même de l’art lui-même.

Appréciation personnelle

Les plus :

+Une histoire de l’art contemporain abordée dans son ensemble.

+Une présentation d’artistes hétéroclites et contextualisation.

+Une mise en relation des spécificités des pratiques artistiques à l’intérieur des mouvements et courants.

+Une exploration variée des mouvements et courants contemporain.

+Un point de vu original sur les mouvements ou les pratiques personnelles des artistes.

Les moins :

Il est parfois difficile de savoir où veut en venir l’auteur.

Un Lexique pas toujours accessible pour les débutants.

Demande parfois des connaissances plus poussées en art pour réussir à comprendre le fond de la pensée de l’auteur.

Et pour l’art, que faut-il retenir ?

L’art est un processus continu de questionnement qui pousse les artistes à réfléchir constamment à leur pratique. Il existe l’idée selon laquelle les artistes avant le 20ème siècle maîtrisaient parfaitement leur art et que soudainement l’art s’est mis à faire n’importe quoi, cette conception n’est pas tout à fait vrai.

En réalité, de nombreux artistes célèbres ont su se démarquer en proposant des approches novatrices, brisant les conventions de leur époque et suscitant souvent la controverse de leurs contemporains.

Sans ce questionnement constant en art, cette discipline aurait probablement disparu depuis longtemps et son histoire n’aurait pas existé.

L’histoire de l’art pour vous situer

Ce livre constitue un excellent moyen d’approfondir ses connaissances en matière d’histoire de l’art contemporain et de ses artistes.

L’auteur passe en revue la plupart des courants et mouvements, en fournissant de nombreux détails quant à leurs particularités. Si vous les connaissez, vous disposerez d’une compréhension plus approfondie de l’histoire de l’art contemporain en général, vous pourrez établir des liens plus facilement entre les différents courants et mouvements, et comprendre pourquoi l’art a atteint un point précis à un moment donné.

Ces connaissances vous permettront de situer votre travail dans un contexte plus large et de vous inspirer d’artistes en particulier pour améliorer votre propre travail. Dans certains cas, cela peut même débloquer votre processus créatif.

L’art c’est se poser des questions

Jean-Luc Chalumeau nous offre une plongée fascinante dans l’œuvre de nombreux artistes, où il analyse leur processus créatif. Ces exemples variés sont un excellent moyen de vous montrer que l’art c’est s’interroger à plusieurs échelles.

Pour un artiste, créer est avant tout une source de plaisir, une façon d’exprimer ce qu’il ressent et de partager sa vision du monde. Pour ce faire, l’artiste utilise différents matériaux, outils et médiums qu’il combine pour donner vie à sa pensée. Cependant, chacun de ces éléments possède ses propres caractéristiques, qui soulèvent la question de leurs limites et des relations complexes qu’ils entretiennent entre eux. Malgré cela, les possibilités infinies qu’ils offrent permettent à l’artiste de continuer à explorer et à expérimenter pour répondre aux problèmes posés par l’Art et la société.

Ce livre montre que la création artistique est un processus complexe où l’artiste doit faire des choix, chercher, se tromper et recommencer, tel un savant en quête de réponses.

J’espère que ce résumé vous a plu et que vous avez découvert de nouvelles pratiques artistiques.

N’hésitez pas à partager votre mouvement, courant ou artiste contemporain préféré dans les commentaires ci-dessous. Cela me permettra de mieux connaître vos goûts et vos centres d’intérêt en matière d’art. 😉

Le livre

Pour acheter un exemplaire du livre L’Histoire de l’art contemporain de Jean-Luc Chalumeau, c’est par ici

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6 commentaires

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Ce n’est pas une partie qui fait l’unanimité. Je voulais essayer de la rendre plus accessible ! 😁👌

J’ai fait des études d’arts plastiques en reconversion professionnelle, votre article est excellent. Merci beaucoup.
Le pop art est un mouvement que j’apprécie particulièrement.

Merci pour ce commentaire. Je suis heureux de savoir que l’article vous a plu.
J’aime également beaucoup le pop art, j’ai eu l’occasion de beaucoup travailler dessus pendant mes études.

Wahouuuu quel boulot ! Bravo pour ton travail et ce contenu hyper riche 🙂
Très sensible à l’Art et curieuse d’apprendre l’histoire des peintres et artistes qui ont créé les courants artistiques. Toujours fascinant ! 🙂

Merci pour ton retour ! 😀
J’espère que tu as trouvé ton bonheur parmi tous ces courants et mouvements !

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